
La facturation électronique sera progressivement déployée dans les mois à venir. L’ensemble des entreprises assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) devront ainsi accepter les factures électroniques à compter du 1er septembre 2026. A la même date, les grandes entreprises et les entreprises de taille intermédiaire (ETI) auront également l’obligation d’émettre des factures électroniques – tandis que les micro-entreprises et les petites et moyennes entreprises disposeront d’un délai supplémentaire d’un an (1er septembre 2027).
Cette réforme concerne les opérations réalisées entre entreprises (B2B) établies en France et assujetties à la TVA, et donc les factures professionnelles émises entre ces acteurs. Son objectif est double : permettre des progrès dans la lutte contre la fraude à la TVA et améliorer la compétitivité des entreprises.
Parmi les bénéfices espérés, on peut ainsi citer la diminution des délais de paiements ; la réduction des impayés par l’amélioration du suivi des factures en attente de règlement ; ou encore la réduction des charges administratives associées à la facturation (avec par exemple le déploiement à moyen-terme du pré-remplissage des déclarations de TVA permettant un gain de temps).
Cette évolution implique néanmoins une anticipation importante afin d’assurer le bon déploiement de la réforme. Nous vous proposons ainsi cet article, afin de faire un rapide tour d’horizon du sujet !
Comprendre le fonctionnement de la facturation électronique
On parle de e-invoicing pour désigner les obligations relatives à l’émission et à la réception de factures électroniques entre entreprises. Une facture électronique constitue un type de document bien précis – comprenant les mêmes mentions obligatoires qu’une facture papier (dates, numérotation, identité de l’acheteur, prix… auxquelles s’ajouteront le numéro SIREN du client, le type d’opération, l’adresse complète de livraison) et remplissant les mêmes fonctions, mais émis sous un format numérique spécifique et structuré, et conservé comme tel.
Attention cependant : le fait d’émettre une facture sur un support numérique ne suffit pas. Une facture papier numérisée en format PDF transmise directement par mail à votre client ne sera pas considérée comme une facture électronique : on parle alors plutôt de facture dématérialisée. La réforme va en fait au-delà de la dématérialisation des factures, et prévoit des normes précises et un format spécifique afin de pouvoir faire transiter la facture par l’intermédiaire d’une plateforme homologuée.
Les caractéristiques d’une facture électronique
Le cadre auquel devra se conformer une facture pour constituer une facture électronique a été défini par un décret et un arrêté d’octobre 2022. Cette standardisation doit notamment permettre la gestion des données par l’administration, à la suite de leur transmission par les plateformes homologuées.
On peut retenir les trois grandes caractéristiques suivantes pour identifier une facture électronique au sens de la réforme :
- Respect d’un des formats de fichier (CII, UBL, Factur-X) définis par l’arrêté d’octobre 2022 ;
- Présence des mentions obligatoires ;
- Transmission au destinataire par une plateforme homologuée.
Par ailleurs, l’entreprise aura la possibilité de recourir à un système de signature ou de cachet électronique afin de garantir l’authenticité du document, son intégrité et sa lisibilité. L’objectif est de sécuriser davantage encore le système de facturation et d’assurer la validité des factures transmises par voie électronique.
Ces factures électroniques devront être conservées pendant 6 ans sous ce format, à partir de la date d’établissement de la facture, afin de répondre aux obligations légales et en cas de litige éventuel. Il existe donc un enjeu d’archivage, afin de s’assurer d’une conservation sécurisée des documents. Là encore, le recours aux plateformes de dématérialisation certifiées par l’État peut représenter une solution d’archivage électronique.
Le rôle des plateformes de dématérialisation
On parle de plateforme de dématérialisation partenaire (PDP) pour désigner l’interface mise en place par un prestataire de services permettant l’émission et la réception de factures électroniques, ainsi que la transmission électronique des données à l’administration.
Dans les faits, la transmission effective de la facture se déroulera entre la plateforme de l’émetteur de la facture et celle du destinataire. Les plateformes seront ainsi chargées d’assurer la compatibilité des différents systèmes, en remettant la facture émise au bon format pour le client. Ce dernier pourra d’ailleurs refuser la facture électronique, dans les mêmes conditions que pour une facture papier.
La plateforme doit avoir été immatriculée par l’administration, pour une période de trois ans renouvelables, sur la base de son respect du cahier des charges arrêté par l’État. L’entreprise opte pour l’une de ces plateformes de dématérialisation accréditées, le projet de portail public de facturation n’ayant finalement pas été retenu. Vous pouvez consulter en ligne la liste des plateformes immatriculées sous réserve, en attendant l’étape des immatriculations définitives attendue pour la fin de l’année 2025.
La mise en place de la facturation électronique
Ces différentes évolutions vont nécessiter des adaptations au sein des entreprises, qui peuvent se préparer dès maintenant aux démarches à mettre en œuvre pour se conformer à la réforme :
- Évolution du processus de facturation, en recensant l’ensemble des acteurs et outils concernés au sein de l’entreprise ;
- Choix d’une plateforme de réception des factures électroniques avant le 1er septembre 2026. La plateforme choisie informera directement l’administration du choix opéré par l’entreprise, qui n’aura pas d’autre démarche à effectuer en ce sens.
- Adaptation de l’organisation de la comptabilité de l’entreprise.
L’entreprise peut s’appuyer sur différents partenaires pour l’aider à déployer ces évolutions : son expert-comptable peut par exemple proposer de prendre en charge les actions relatives à la facturation électronique ; les progiciels de gestion intégré (ERP…), sont susceptibles d’évoluer pour intégrer directement la transmission des données vers la plateforme retenue. D’autres solutions techniques devraient apparaître et être déployées progressivement pour faciliter la transition vers la facturation électronique.
La direction générale des finances publiques propose de nombreuses ressources pour aider à mieux appréhender cette réforme, et notamment une série de fiches pédagogiques explorant les différents enjeux pour chaque entreprise.
Comprendre le champ d’application de la réforme
Le périmètre de la réforme
La réforme concerne l’ensemble des entreprises établies en France et assujetties à la TVA, y compris les entreprises assujetties à la TVA sans en être redevables – par exemple les entreprises en franchise en base de TVA (micro-entrepreneurs…).
Son périmètre inclut ainsi virtuellement l’intégralité des opérations réalisées entre entreprises établies en France et assujetties à la TVA.
En conséquence, seules certaines opérations spécifiques ne sont pas concernées et pourront continuer à donner lieu à l’émission d’une facture papier. On peut ainsi citer les ventes ou prestations réalisées auprès d’un particulier, ou encore les opérations réalisées dans des territoires où la TVA ne s’applique pas (certains territoires français ultramarins et les opérations réalisées à l’étranger).
A fortiori, les opérations dispensées de l’obligation de facturation dans le Code général des impôts ne sont pas concernées par la réforme. Enfin, les associations à but non-lucratif non assujetties à la TVA n’ont pas non plus l’obligation d’émettre, de transmettre ou de recevoir des factures électroniques.
Le calendrier de la réforme
Le calendrier de déploiement de la réforme varie selon la taille de l’entreprise considérée :
- Pour la réception et la conservation des factures électroniques, c’est l’ensemble des entreprises qui seront concernées dès le 1er septembre 2026 : c’est la conséquence logique du fait que les grandes entreprises et les ETI seront obligées d’émettre des factures électroniques dès cette date. À noter également, les entreprises n’émettant pas de factures sont aussi concernées – puisqu’elles devront répondre à l’obligation de réception et conservation des factures électroniques.
- Pour l’émission de factures électroniques, le calendrier est plus complexe – du fait de la distinction entre grandes entreprises et ETI d’une part (obligées d’émettre des factures électroniques au 1er septembre 2026), et petites et micro-entreprises d’autre part. Ces dernières disposent en effet d’un an supplémentaire pour mettre en place la réforme, ayant l’obligation d’émettre des factures électroniques au 1er septembre 2027. Elles peuvent néanmoins choisir d’anticiper l’entrée en œuvre de la réforme, et émettre des factures électroniques dès le 1er septembre 2026.
- Enfin, le calendrier des obligations de transmission de données à l’administration est calqué sur celui de l’émission de factures électroniques décrit ci-dessus.
À l’issue de la mise en œuvre de cette réforme, la loi prévoit une amende forfaitaire de 15 euros en cas d’infraction – avec une tolérance pour la première infraction et un plafond annuel de 15 000 euros d’amendes.
Un autre aspect de la réforme : la transmission électronique des données à l’administration
L’obligation d’émettre et recevoir des factures électroniques s’accompagne d’une obligation de transmission des données de facturation, de paiement et d’encaissement à l’administration (e-reporting). Cette obligation s’étend au-delà du périmètre des opérations concernées par la facturation électronique : en plus des opérations entre entreprises mentionnées dans le cadre de la facturation électronique, les opérations avec des clients particuliers ou des personnes non assujetties à la TVA (clients particuliers, associations à but non lucratif) et les transactions internationales sont également concernées. Ainsi, les données relatives à chaque transaction devront être transférées par l’entreprise réalisant l’opération à l’administration – qui pourra connaître de façon plus précise l’activité économique de chaque entité. Seules les opérations explicitement hors du champ d’application de la TVA dans le code général des impôts sont par principe exclues du champ du e-reporting.
La périodicité de la transmission de ces données dépendra du régime d’imposition à la TVA de l’entreprise concernée : les entreprises au régime réel normal mensuel devront ainsi transmettre leurs données tous les dix jours, tandis que les entreprises au régime en franchise en base de TVA devront procéder à une transmission tous les deux mois.
Là encore, l’entreprise concernée par cette obligation de e-reporting devra passer par une plateforme de dématérialisation, avec plusieurs solutions techniques existantes selon les outils de facturation dont vous disposez.
Les opérations concernées à la fois par le e-invoicing et le e-reporting font l’objet d’un traitement unique, la plateforme de dématérialisation par laquelle transitent les factures électroniques transmettant les données afférentes à l’administration fiscale. Les données transmises pour les opérations ne relevant que de l’obligation de e-reporting sont identiques à celles extraites via la facturation électronique.
En résumé, la mise en place de la facturation électronique généralisée entre entreprises représente une évolution importante. La réforme ne se limite pas à l’émission et la réception de factures, mais comprend également un volet relatif à la transmission des données à l’administration fiscale. Ce nouveau cadre doit notamment permettre de faciliter l’application de la fiscalité s’appliquant aux entreprises et d’améliorer leur compétitivité par une réduction des coûts. À terme, la réforme devrait permettre une réduction des délais de paiement entre entreprises – avec des conséquences positives attendues sur la gestion de leur trésorerie.
Elle implique néanmoins des efforts d’adaptation pour les entreprises – chaque dirigeant ayant intérêt à se renseigner sur sa situation spécifique pour connaître les conséquences précises de la réforme pour son entreprise. Nous vous invitons ainsi à consulter les ressources supplémentaires mentionnées dans cet article pour aller plus loin.